mercredi 9 mars 2016

Religion et Modernité : Ancien débat, nouveau défis






Depuis la « révolution foucaldienne », nous sommes persuadés qu’à l’intérieur de toute tradition religieuse, les éléments de continuité tiennent aux formes, aux institutions plus qu’aux doctrines. Les mots sont ainsi des vases vides dans lesquels les générations successives de croyants versent le vin de leurs convictions. Il est reconnu qu’il existe des traditions culturelles identifiables et que chacune d’entre elles a connu des modifications politiques, sociales et comportementales importantes en son sein. Nous vivons avec le changement et nous admettons que tout ce qui vit change…à une seule exception près : la religion. Si la tradition religieuse d’une culture est morte, comme c’est le cas de la religion Gréco-romaine, nous convenons de sa nature organique, mais si elle a survécu, nous avons tendance à la considérer comme une constante culturelle. C’est pratiquement vrai dans la région arabe où les trois monothéismes fondent leur autorité sur la base de la révélation et s’appuient sur une écriture qui impose des formes de culte, de pensée et de langage à la communauté. Les croyants oublient que s’ils lisent un de ces textes anciens et se sentent liés par ses prescriptions, ils projettent inévitablement dans celui-ci leurs sentiments ainsi que leurs besoins et modèlent ses préceptes selon les notions du bien qui prévalent à leur époque. Les traditions religieuses témoignent du même processus d’adaptation dynamique et de changement organique que les autres éléments de la culture dont ils font partie. Ainsi, la tendance à nier le changement procède d’une nécessité fondamentale : être rassuré. La vie est courte. Nos expériences sont déroutantes. Une grande partie de ce qui constitue la religion satisfait au besoin humain de créer une impression d’ordre et de stabilité au milieu du flux. Si nous n’en sommes pas conscients sur le moment, les preuves de sa puissance sont tout autour de nous. Le monde arabe est plein de femmes et d’hommes terrorisés par le changement au point qu’ils ont fait une politique de ce besoin de stabilité, s’efforçant de contraindre les écoles à promouvoir et à justifier leur conviction que la Tradition à prendre au pied de la lettre. Ces aspirations passionnelles sont compréhensibles, mais il serait désastreux pour notre société qu’elle s’y abandonnât.

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