lundi 26 janvier 2015

Reconstruire le passé : La Tunisie postrévolutionnaire face à son Patrimoine




D’une diversité et d’une richesse remarquable, le patrimoine tunisien est un important facteur d’identité et un élément précieux de notre cadre de vie, mais sous la multiplication récente des formes de patrimoine, subsiste une remarquable constance de cette notion. Qu’est ce en effet que le patrimoine ? L’étymologie (patrimonium, ensemble des biens appartenant au père) et toutes les définitions classiques le rattachent à l’héritage mot qui sert d’ailleurs à le traduire en anglais. Dans ces définitions, le patrimoine est ce qui se transmet d’une génération à l’autre. Dans notre société errante, que ne cessent de transformer la mouvance et l’ubiquité de son passé, le patrimoine historique est devenu un des maîtres mots de la tribu médiatique postrévolutionnaire. En effet, le transfert sémantique subi par le mot depuis l’indépendance jusqu’aux nos jours signale l’opacité de la chose. Ainsi, le patrimoine historique et les conduites qui y sont associée se trouvent pris dans des strates de significations dont les ambiguïtés et les contradictions articulent et désarticulent deux mondes et deux visions du monde. Le culte rendu aujourd’hui au patrimoine historique appelle donc mieux qu’un constat de satisfaction.  Depuis plus de quatre ans, la mise en œuvre des politiques publiques du patrimoine se réalise par des instruments normatifs qui traduisent leur appréhension et leur saisie par le droit. Les différents outils institutionnels, conventionnels, législatifs et réglementaires contribuent dans une large mesure à la conservation et la valorisation du patrimoine nationale. La protection concerne bien le patrimoine matériel (sites archéologiques, musées, expositions…) et le patrimoine immatériel (musique et chant traditionnelle, artisanat tunisien…) . La nature et le contenu des dispositifs de protection, qu’elle soit mise en œuvre aux niveaux national ou régional procèdent de paramètres et se réfèrent à des objectifs divers mais convergents, parmi lesquelles les problématiques identitaire et patrimoniale occupent une place souvent déterminante. Elle doit en outre prendre en compte la spécificité des milieux comme des sociétés, et la relation des populations et des communautés à leur patrimoine, aussi bien reçu que construit. Le droit tunisien s’est intéressé tardivement à la protection du patrimoine et à sa conservation, à travers une démarche formelle qui ne s’est que progressivement distinguée des disciplines juridiques classiques, pour finir par s’en démarquer, tout en demeurant largement en relation avec celles-ci. La saisie par le droit des questions patrimoniale, dans leurs dimensions culturelle et scientifique, et la formulation normative des réponses à y apporter ont fait écho au souci de concevoir et de mettre en œuvre des instruments aptes à satisfaire à des objectifs de protection. Ceux-ci doivent être à appréhendés et interprétés par référence à une vision sociétale du patrimoine, et répondre aux données socioculturelles de sa perception par les populations comme par les institutions spécialisées. La construction diachronique d’une protection juridique pertinente, en termes de durabilité notamment, va progressivement conduit le droit positif à prendre en compte l’ensemble du patrimoine national.

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